top of page

Une équipe servie sur un plateau


Le BYOD (Bring Your Own Device) apparaît au milieu des années 2000. Il désigne une pratique consistant pour un salarié à apporter son matériel informatique personnel (tablettes, ordinateurs, smartphone, etc.) sur son lieu de travail. La mode est désormais au BYOT : Bring Your Own Team!

C’est l’expérience qu’a notamment tentée STRIPE, une start-up américaine spécialisée dans les services de paiement en ligne. Cette start-up a décidé d’expérimenter le recrutement d’équipes déjà structurées en lançant une annonce sur son blog en avril 2016. L’entreprise ne cherche pas à recruter son futur collaborateur… mais une équipe déjà entièrement constituée. Les profils recherchés sont principalement des développeurs, mais aussi des designers, des chargés de projets et des chefs de produits. L’idée du BYOT est simple : « venir en équipe, c’est venir avec des gens de confiance, des gens avec qui on travaille bien et vite ».

Ainsi, une équipe (2 à 5 membres) envoie son dossier de candidature constitué des curriculums des membres de l’équipe et d’un document décrivant les projets sur lesquels chaque membre de l’équipe a travaillé et les résultats obtenus. Après sélection sur dossier, l’équipe passe un processus de recrutement collectif avec mise en situation. Enfin, l’équipe retenue doit accepter l’offre unanimement pour pouvoir intégrer la start-up, sur le principe « tout ou rien ».

Le BYOT semble être adapté à des contextes de recrutement massif, permettant de faire gagner du temps et de l’argent à l’entreprise. Il permettrait également d’éviter les erreurs de compatibilité dans les recrutements en recherchant des synergies déjà activées. En effet, pour un recruteur, il n’est pas évident de savoir lors de l’entretien d’embauche si tel candidat travaillerait efficacement avec tel autre candidat ou collaborateur. La philosophie gestionnaire de cette pratique est donc tournée vers la maximisation hyper rapide de la cohésion d’équipe et la minimisation des risques de non collaboration. Nous notons que le BYOT, tel qu’appliqué dans le monde de l’entreprise, est emprunté aux domaines artistiques et sportifs, où la pratique est courante. Il constitue aussi une certaine forme d’explicitation du principe de cooptation, avec l’avantage d’être plus transparent et plus rapide.

Avis de l’Observatoire : le concept théorique au cœur de cette pratique est celui de socialisation. Une partie de l’efficacité du fonctionnement des organisations dépend de l’intégration de ses membres et de la capacité de l’organisation à faire avancer chacune de ses composantes dans la même direction. La phase de socialisation dans l’organisation est la période pendant laquelle les nouvelles recrues assimilent les valeurs et les modes de fonctionnement. Elle correspond aussi à cette période où se constituent les dynamiques collectives, de groupe, d’équipe. Des travaux de recherche ont identifié depuis la fin des années 1970, les différentes « tactiques » de socialisation. Le BYOT est une tactique récemment identifiée et qui parie sur le fait que le recrutement d’une équipe déjà constituée « épargne » à l’organisation une partie du temps et de l’effort de socialisation. Les dynamiques de groupes sont déjà à l’œuvre quand l’équipe arrive dans l’organisation. Naturellement, cela fonctionne bien lorsqu’il est possible de recruter des équipes avec un fonctionnement relativement autonome, un peu comme si l’organisation était constituée de cellules indépendantes, aux fonctionnements propres.

La pratique a ses limites. Les dynamiques collectives se mettent en place dans un contexte et fonctionnent différemment (parfois moins bien) dans un autre contexte. Autrement dit, la partie contingente du fonctionnement des équipes est en partie négligée dans le BYOT. Par ailleurs, il y a un risque à faire entrer dans l’organisation des corps sociaux déjà constitués, ayant développé potentiellement des mécanismes sociaux et des modes d’interaction peu compatibles avec le mode de fonctionnement de l’organisation. Et lorsqu’une organisation se trompe sur le recrutement d’une personne, l’impact n’est pas le même que lorsqu’elle se trompe sur le recrutement de tout une équipe !

Les réseaux sociaux sont des accélérateurs potentiels pour ce type de pratique. Des robots peuvent même aider à la constitution d’équipes (pour certains d’entre eux, ces robots fonctionnent sur la base d’algorithme de matching). Par ailleurs, les pratiques de BYOT semblent particulièrement adaptées au secteur du développement informatique (cf. le BYOT Challenge mis en route par Mintos).

Recent Posts
bottom of page