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Communauté, partage et dépendance


Le développement des comportements collaboratifs s’est très certainement amplifié et / ou résonne différemment à l’ère des transformations digitales. Les initiatives foisonnent et la visibilité des expériences en la matière est accrue. L’innovation en management n’est naturellement pas déconnectée de ce mouvement, pour trois raisons au moins. D’abord, le management est intéressé par les mécanismes de formation et d’animation des dynamiques collaboratives, quelles qu’elles soient et où qu’elles se situent. Ensuite, le développement des pratiques collaboratives et communautaires bouscule potentiellement les modèles d’affaires, les éco systèmes, les comportements des clients, des utilisateurs, des usagers, etc. Enfin, les logiques communautaires et collaboratives sont parfois les fondements des systèmes de valeurs pris explicitement en référence par les organisations. C’est le cas de la MAIF qui a mis en place le MAIF Social Club.

La MAIF Social Club désigne une communauté de sociétaires MAIF souhaitant adopter et partager des comportements collaboratifs. « Basée sur la confiance et la proximité, elle s’appuie sur les principes de consommation alternative et collaborative », lit-on sur le site du dispositif. A la fois privée et étendue, cette communauté existe à travers deux substrats techniques : un lieu physique et une présence sur les réseaux sociaux ainsi qu’une application. Le lieu physique est un espace de 1000m2 qui se trouve au centre de Paris et où sont organisés divers évènements promouvant la culture et l’innovation sociétale : des expositions d’art, des conférences et des débats (« comment les images augmentées profitent-elles à la société ? » ou « image likée : nouveau moyen d’exister ? »), des rencontres avec des initiatives collaboratives comme La Ruche qui dit oui !, etc. L’accès à cet espace est gratuit et il est ouvert à tous. La MAIF Social Club est également présente sur les réseaux sociaux (Twitter, Facebook), possède un site internet en version béta (www.maifsocialclub.fr) et une application. A l’aide de ces outils, un sociétaire MAIF peut se géolocaliser et entamer une recherche multicritère pour chercher ou proposer un bien, un service ou un projet basé sur le partage. Nous pouvons y trouver des annonces (services et entraide, évènements, hébergements de vacances, associations, véhicules, logements, vide grenier), des services collaboratifs (échanges de maison, covoiturage gratuit, entraide gratuite entre voisins, prêts d’objets entre particuliers, parking partagé, etc.) et des évènements divers. L’accès à ces annonces est, lui, réservé aux sociétaires. La MAIF Social Club serait donc une plateforme agrégeant les services des plateformes collaboratives spécialisées (Airbnb, Blablacar, mon p’tit voisinage, etc.) et offrant l’avantage de mettre en contact des personnes connues de la MAIF (car tous sociétaires). Ainsi, un niveau de confiance est déjà instauré, difficile à garantir sur les autres plateformes collaboratives. En s’appuyant sur les outils digitaux pour créer une communauté physique et virtuelle, la MAIF réaffirme sa position d’assureur « responsable » et rappelle une position en faveur de l’économie alternative et collaborative. Cette initiative semble être en continuité avec le projet d’entreprise de la MAIF et en rupture par rapport aux messages d’autres assureurs.

Avis de l’Observatoire : Plusieurs grilles permettent de lire l’initiative de la MAIF. Elles sont complémentaires. D’abord, la MAIF met en place un dispositif qui lui permet de s’ancrer sur un « territoire symbolique » et d’image. La MAIF consolide son positionnement en terme de valeurs et de référents culturels et elle le rend plus clair et plus visible. Ensuite, le Club est un moyen d’introduire d’autres formes de relations entre la MAIF et ses sociétaires (ou de potentiels sociétaires) : la MAIF n’est plus uniquement assureur puisque les outils développés permettent de « mettre en relation ». La MAIF devient entremetteur, ce qui au passage, légitime encore plus sa place dans l’univers du collaboratif et du partage. Par ailleurs, la MAIF dispose potentiellement d’un outil qui permet de produire de la connaissance sur ses sociétaires, leurs usages, et plus encore, d’un outil permettant de contribuer à conformer des comportements ce qui pour un assureur mutualiste (comme pour beaucoup d’organisations) présente beaucoup d’intérêt. La constitution d’une communauté de sociétaires signifie la constitution d’un groupe qui partage quelques valeurs et / ou qui a quelques réflexes et quelques comportements communs. En passant, nous retrouvons ici quelques fondamentaux du marketing qui sous tendent les actions visant à favoriser l’émergence de communautés de clients et d’utilisateurs (pour fidéliser, rapprocher, etc.). Enfin, il y a probablement une dose importante de lucidité sur l’évolution du monde quand la MAIF crée la MAIF Social Club. Les modèles d’affaires futurs vont devoir intégrer un certain nombre d’évolutions (et ont déjà commencé à le faire) et les transformations associées au partage et au collaboratif en constituent une part importante. La création d’un lieu physique, en complément du lieu virtuel, est intéressante car elle donne de l’eau au moulin de ceux qui pensent que développement du partage et du collaboratif d’une part et transformation digitale d’autre part, ne vont pas nécessairement de paire.

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